Tu t'écroules. Il y a eu cette salve de coups, des séries de crochets et d'uppercuts. Puis des cris vaporeux et lointains, un clapotis sourd au creux de tes oreilles et le silence absolu. Tes jambes chancelantes n'ont plus supporté ton propre poids. Alors tu as posé le premier genou au sol. Tu as baissé ta garde bien trop vite. Bien trop tôt. Ces premiers coups, tu les as encaissés sans broncher, mais ils t'ont démonté peu à peu. Alors, tu as été moins vif, tes pas sont devenus lourds et tes frappes hésitantes. Et tu n'as pu que subir, inéluctablement, les coups portés aux flancs, aux reins, aux côtes. La chair et les os.
Décompte. 1. (...). 2. (...). 3. Tu lèves la tête. Du sang perle le long de ta tempe en gouttes épaisses. Ta vision est floue, ta tête va imploser. Tu ne te relèveras pas. 4. 5. Ton corps, cotonneux, ne ressent plus la douleur et, même si les choses autour de toi reprennent forme, tu sais qu'il te sera impossible de reprendre le combat. 6. Il te reste 4 minuscules secondes: tu dois te battre. D'abord contre toi. Ce sera ta première victoire. 7. Tu réunis tes dernières forces. Tu n'as qu'une infime chance de pouvoir aller au bout. Au bout de toi-même. 8. D'abord les bras, le buste. 9. Puis le genou, celui qui a plié et t'a fait choir. Et enfin, les jambes. Elles ne tremblent plus.
Tu es à nouveau debout, prêt à bondir, la mâchoire crispée. Tu te laisses quelques instants pour serrer les doigts entravés dans tes gants et te redonner du courage. Tes yeux sont devenus profondément noirs, du noir des ténèbres. Là où l'espoir ou la souffrance n'ont plus raison d'être. Alors il n'y a plus de doutes, de douleurs et d'orgueil. Mais de la rage.