Lucky Beli

Chronique épique d'un cynisme suranné

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mercredi, novembre 3 2010

La Créature

Puis, peu importe où vous serez, que ce soit dans un restaurant bondé ou dans une rue déserte ou même dans le confort de votre propre appatement, vous en viendrez à démolir toutes vos belles certitudes. Vous resterez dans un coin tandis qu'une chose immense et complexe surgira, déchirant, déchiquetant tous vos dénis soigneusement élaborés, qu'ils soient délibérés ou inconscients. Et alors, pour le meilleur ou pour le pire, vous vous retournerez, incapable de résister, tout en essayant quand même de résister, vous lutterez de toutes vos forces pour ne pas faire face à la chose que vous redoutez le plus, et qui est maintenant, qui sera, qui a toujours été là avant, la créature que vous êtes réellement, la créature que nous sommes tous, enfouie dans l'obscurité anonyme d'un nom.
Et alors les cauchemars commenceront.

La maison des feuilles, extrait. Mark Z. Danielewski.

lundi, novembre 1 2010

Eluard, les chanteurs morts et mon chat sur les genoux

Sur les paroles de Miossec (1964 fois) et celles de Prévert
Sur la Javanaise et les notes en bas de page de la Maison des Feuilles
Sur la stèle de Brel et le sable de la plage de Sête
Sur le cercueil de Desproges (même s'il est piègé)
Sur les dessins de Larcenet et dans les parenthèses de Jaenada
Sur la couverture de l’Écume des jours

J'écris ton nom:

J. Errand

mardi, avril 27 2010

Le polaroïd

"A l'intérieur, il y avait un polaroïd: Pollux Lesiak qui faisait une petite grimace. à mourir.La matérialisation du charme insaisissable qui renverse, la preuve par l'image, évidente et claire: ce visage à la fois candide et lucide, cette grimace provocante, voilà pourquoi tous les hommes courent après toutes les femmes depuis des millions d'années sans jamais réussir à les toucher. Parce qu'elles sont plus avisées qu'eux, parce qu'elles sont plus courageuses, plus clairvoyantes, plus sages, plus folles, parce que, lorsqu'elles regardent devant elles, toutes les femmes ont de la lassitude dans les yeux et de l'envie par dessus, la résignation et le défi en même temps - elles sourient, et le pauvre bonhomme ne comprend rien. Lui, soit il sait qu'il ne faut rien attendre de l'existence, reste assis et devient cynique; soit il croit bêtement que l'on peut arriver à quelque chose, se lance à l'assaut en brandissant son glaive et tombe dans le vide - et personne ne l'entend crier dans sa chute. Elle, les deux en même temps: elle sait qu'il ne faut rien attendre de l'existence, mais se lance à l'assaut malgré tout, juste pour vivre, sans peur puisqu'elle ne risque pas de tomber. J'allais essayer de faire pareil. Et d'abord, je devais arrêter de raisonner, et agir. Oui, j'allais courir après Pollux et essayer de la toucher. En dessous de la photo, sur la partie blanche, elle avait écrit son numéro de téléphone au feutre noir."

Philippe Jaenada. Le chameau sauvage.