Lucky Beli

Chronique épique d'un cynisme suranné

Aller au contenu | Aller au menu | Aller à la recherche

dimanche, avril 17 2011

La chute

Et que l'on quitte, que l'on aime et que l'on oublie
Que chaque souvenir consigné dans une boîte au grenier,
Embué de larmes et jusqu'au dernier
D'une douce mélancolie le coeur emplit.

Que resurgissent alors, aux confins de la nuit, fantômes tristes,
Venant à tout jamais te hanter, peupler tes insomnies.
Domptant jusqu'alors le vide, du fil l'équilibriste
Est tombé et ce n'est pas tant la chute qui l'anéantit.

samedi, février 5 2011

Le rituel

C'était une de ces journées à fantômes. Une journée mélancolique à regarder ruisseler la pluie sur le carreau, du jazz passablement triste en fond sonore. Et j'ai dû fermer les yeux, l'espace d'un instant. Et tu sais, dans ces moments là, les yeux, quand tu les ouvres à nouveau, ils sont toujours un peu embués. Il n'a fallu que quelques impitoyables secondes pour que je te revoie faire ce rituel immuable qui me faisait tant sourire, lorsque tu versais religieusement un sachet de sucre roux à la surface de la mousse légère de ton cappuccino... J'ai revu chacun de tes gestes avec une effroyable netteté, jusqu'à la délectation qui accompagnait chaque cuillerée de ce nuage onctueux. J'ai repensé alors à ce baiser, cette fraction de seconde là. Et aux autres. Soudain, ma gorge s'est nouée, mes yeux m'ont brulé, comme s'ils avaient été frottés au papier de verre, et les écluses ont fini par céder.

Le mur a depuis longtemps volé en éclats. Et le tableau reste accroché. Un souvenir inamovible retenu à rien, flottant dans les limbes de la mémoire. Celui des jours heureux, ironiquement empreint de tristesse et de mélancolie. Cette même mélancolie qui se tapit dans l'ombre, prête à surgir au détour d'un café. Et j'ai l'impression que mon coeur, dans ces moments là, s'arrête de battre. Une fraction de seconde.

lundi, décembre 20 2010

Une fraction de seconde

ça ne dure jamais très longtemps, ces petits instants du quotidien, ceux que tu voudrais gravés à jamais, scotchés sur le coeur en guise de pense-bêtes indélébiles. Ces instantanés de sourires sans fin piégés dans un petit bout d'éternité. Des baisers qui durent juste une infime fraction de seconde supplémentaire, celle où les lèvres s'accrochent, se mêlent, s'électrisent. Des nébuleuses d'où s'échappent des poussières d'étoiles qui virevoltent et qui dansent, qui bruissent, floconnent et disparaissent dans un rai de lumière. Et toi, muni de ton petit filet à bonheur avec des papillons dedans, tu enjolives, tu Cyrano, tu Roxanne et pars cueillir, éblouissant idéal, ces morceaux d'infini suspendus à rien.

mercredi, novembre 3 2010

La Créature

Puis, peu importe où vous serez, que ce soit dans un restaurant bondé ou dans une rue déserte ou même dans le confort de votre propre appatement, vous en viendrez à démolir toutes vos belles certitudes. Vous resterez dans un coin tandis qu'une chose immense et complexe surgira, déchirant, déchiquetant tous vos dénis soigneusement élaborés, qu'ils soient délibérés ou inconscients. Et alors, pour le meilleur ou pour le pire, vous vous retournerez, incapable de résister, tout en essayant quand même de résister, vous lutterez de toutes vos forces pour ne pas faire face à la chose que vous redoutez le plus, et qui est maintenant, qui sera, qui a toujours été là avant, la créature que vous êtes réellement, la créature que nous sommes tous, enfouie dans l'obscurité anonyme d'un nom.
Et alors les cauchemars commenceront.

La maison des feuilles, extrait. Mark Z. Danielewski.

mardi, novembre 2 2010

Le recommencement

Je me hais.
Tu es là, belle à crever, rayonnante de tout cet amour que tu me portes. Et moi, je me demande ce que tu fous là. Alors je vais fumer une clope sur le balcon. Je me dis que ça va me passer comme une envie de pisser. Et ça ne passe pas. Les démons enfouis, même aussi profondément que l'on puisse, finissent toujours par refaire surface et te rappeler que ce bonheur n'est pas pour toi. Alors j'en viens à ne pas supporter jusqu'à ta présence, parce qu'elle est le miroir de cet idéal qui m'échappe. Tu n'as rien dit . Je suis sûr pourtant que tu l'a vu, ce regard noir et glacial quand je suis revenu. Celui dont je ne parviens pas à te protéger. Je ne sais même pas comment tu fais pour supporter ça. Je ne la supporte même pas moi même, cette ineffable obscurité qui me ronge et me brûle. Et tu devrais me haïr plutôt que de m'aimer. C'est sans doute la seule chose sensée à faire. Haïs moi comme je me hais. Comme je me vomis. Ils ne me laisseront pas en paix.

lundi, novembre 1 2010

Eluard, les chanteurs morts et mon chat sur les genoux

Sur les paroles de Miossec (1964 fois) et celles de Prévert
Sur la Javanaise et les notes en bas de page de la Maison des Feuilles
Sur la stèle de Brel et le sable de la plage de Sête
Sur le cercueil de Desproges (même s'il est piègé)
Sur les dessins de Larcenet et dans les parenthèses de Jaenada
Sur la couverture de l’Écume des jours

J'écris ton nom:

J. Errand

lundi, octobre 18 2010

Les Fées, les Lutins, tout ça...

Dix minutes de conversation avec la Fée. (la Fée, elle est trop bien: à elle seule, elle peut revendiquer de m'avoir fait lire, écouter ou voir Jaenada, Ash Wednesday ou Garden State (ah, et tant que j'y suis, si vous croyez que les fées ou les lutins n'existent pas, ce blog n'est pas pour vous)). Elle avait pas trop le moral pour pas dire qu'elle avait cette douce mélancolie qui ronge de là à là (au moins, tu penses!), à écouter en boucle des chansons qu'on croirait écrites pour nous apprendre à faire des noeuds coulants. Bref. Je lui ai prestement remonté les bretelles, le moral et les stats de son blog. Ce qui m'a permis de voir qu'elle avait pris de bonnes résolutions avec deux bons mois d'avance, ou dix de retard (eh, t'as vu, moi aussi je sais faire du calcul mental), si l'on s'en réfère au calendrier imposé par Christophorus Clavius pour rattraper le temps perdu alors même que Proust n'était pas né. Le poisson non plus (et on ne peut pas spécialement dire que je sois fier de celle-là, mais je l'assume).

Je n'aurai donc qu'une chose à dire:

Bonne année, Fée.

samedi, octobre 16 2010

15 ans

Ca fait 15 ans que j'ai plus 15 ans ('fin grosso modo, mais on n'est pas là pour compter, c'est surtout pour la figure de style, hein). Et pourtant, j'ai l'impression d'être retombé à cet âge ingrat où ta voix monte encore dans les aigus par saccades, où tu comptes désespérément tes poils et tes boutons (en attendant le jour où tu auras plus de premiers que de seconds) et où la seule chose qui compte vraiment c'est de savoir si tu plais à la fille là-bas, tu sais la petite mignonne assise au deuxième rang (autant dire que c'est super important le rang, au lycée, parce que clairement tu ne vas convoiter ni l'intello moche assise devant ni la BMC (acronyme adolescent de "bonne mais conne"; ndlr) du fond de la classe aux allures de pétasse qui fait éclater bruyamment sa bulle de chewing-gum en se balançant sur sa chaise (et je m'aperçois que je tombe à peine dans le cliché, parce que dans mes souvenirs, ça ressemblait vraiment à ça)), avec ses beaux cheveux et tout, autant qu'elle elle te plaît (ah, avec toutes ces parenthèses à la con, t'as perdu le fil, pas vrai?). Tout un programme. 15 ans, je vous dis. Une éternité que j'avais pas ressenti ça. Je veux dire ces petits frissons et le coeur qui tambourine comme un sourd. Alors je deviens dégoulinant de mièvrerie (un vrai marshmallow micro-ondé (ne reproduisez pas cette expérience chez vous)), perdant jusqu'à mon cynisme et mon sens de la répartie. Pour le cynisme, ok, je me dis que c'est pas plus mal, mais pour le sens de la répartie, ça va pas m'aider: je raconte n'importe quoi, en enjolivant un peu (pas trop, faut pas pousser), des petites banalités du quotidien, tout ça. C'est même pas grave. Et je souris à la moindre de ses paroles, en ponctuant ci et là ses phrases de "waoh, génial" et autres "ah ouais, comme moi!". Le pire, c'est que je le crois. Elle m'écoute et sourit à son tour. Les choses simples, évidentes, un peu futiles. Le retour des parenthèses à tout va (mouais, bon, ça, c'est surtout pour te tenir par la main, alors, même si t'es obligé de relire trois fois mes phrases pour comprendre où je veux en venir, c'est pas la peine de râler: tu verras bien que j'avais raison quand t'auras essayé de passer ton sachet de marshmallows au micro-onde). Et puis bon, faut bien reconnaître que ça fait du bien. Vraiment du bien. Parce que je me croyais même plus capable d'éprouver cette sensation. Vous savez, les phéromones, l'adrénaline, les mains un peu moites, la gorge sèche et le sourire tout niais. Ca faisait tellement longtemps. 15 ans, au bas mot (ça, c'est purement rhétorique, mais j'étais pas sûr que tu m'aies suivi...). Ok, j'ai grandi, mué, pris quelques poils et il n'y a même pas mon ex de seconde F dans mes contacts facebook. C'est pour dire. Et pourtant, même si je me sens un peu concon (en même temps, c'est pas vraiment comme si j'allais rouler ma première galoche non plus), je dois bien admettre que ça fait un bien fou (un peu comme faire du vélo sans les mains (comprenne qui pourra)) d'avoir à nouveau 15 ans.

dimanche, octobre 10 2010

Camisole

Et voilà que la rage, contre les démons t'évertues
Qui de t'enfermer en cage à force de trop t'être battu
Illusion que tu croyais amour aux bras de la plus belle femme
Ne laissant que du vide autour et ton coeur ravager l'âme

Sans que tu ne saches ce pour quoi s'effondre l'empire
Ni qui blâmer, accabler ou couvrir d'opprobres
Alors que, damné, sous toi se dérobe
La terre, si bien que tu lâches qui te pouvait retenir

Que s'engouffrent dans l'ogresse rêves et souvenirs
A tout jamais engloutis sans le moindre soupir
Qu'il ne subsiste ne serait-ce que vent que tu étreignes
Mais des larmes qui en silence tout espoir éteignent

Hurle à tout va Don Quichotte tu n'es plus qu'une grande
Ombre vide et creuse de sorte que même les fous ne t'entendent
Agonisant et risible, beuglant tes murmures
Serré dans cet invisible étau prisonnier de ces murs

samedi, septembre 25 2010

Le départ (en silence)

Tu te doutais que j'allais finir par partir, que je ne pouvais en supporter davantage. Ce n'était qu'une question de temps. Je ne pouvais faire un pas de plus; je n'en avais plus la force. Je n'avais d'autre choix. C'était la seule façon de tenir debout. Tes mots n'y pourront rien changer. Ils ne suffiront pas à me faire revenir...
Je n'ai pas fait le moindre bruit. Tu n'as même pas entendu la porte quand je l'ai laissée claquer. Tu vas bientôt te réveiller et comprendre que le lit est vide. Mais je serai déjà loin. Je ne t'ai laissé aucun mot, aucune explication. Les adieux, ce n'est pas ce que je fais de mieux. Et puis, à quoi bon. Rien n'y changera rien.

Alors ne dis rien, je t'en prie.
Ce silence est à nous.
C'est peut-être la seule chose qu'il nous reste.

samedi, septembre 25 2010

Musique de fin

(retour du billet sonore)

Tu fermes le robinet. Quelques gouttes s'y échappent encore et s'échouent bruyamment dans le bain que tu viens de faire couler. Une vapeur presque opaque a envahi la pièce et s'est condensée sur les miroirs. La plaie que tu as sur le flanc est profonde et vive. Tu as perdu beaucoup de sang. Ta chemise en est maculée. Tu sers les dents pour la retirer, tu n'as même plus la forcer d'ôter ton pantalon. Alors tu plonges dans l'eau qui s'imprègne de volutes rougeâtres. La douleur se tait quelque peu, même si l’hémorragie semble plus intense. L'eau n'est qu'une mare rouge unie qui contraste avec l'émail éclatant de la baignoire. Tu fermes les yeux et repenses à la série d'évènements qui t'ont conduit jusque là, même si tu n'en comprends pas le quart. De toute façon, tu n'as plus vraiment la force de te poser des questions, ni même celle de lutter. Tu glisses un peu plus dans l'eau. Ta tête n'est plus qu'à moitié hors de l'eau. Tu rouvres les yeux et tu te laisses complètement immerger dans cette bulle chaude où les sons te parviennent atténués. Tout y est plus doux. Tu ne remonteras pas.

jeudi, août 26 2010

Les détails insignifiants

Ton parfum de glace préféré est vanille fruits rouges et tu détestes que je me colle contre toi. Tu exècres les sacrifices qui découlent de tes choix professionnels et tu adores que je devine ce dont tu as envie, surtout s'il s'agit de fondant au chocolat. Tu ne supportes pas de sortir sans être maquillée ni coiffée. Tu peux acheter des vêtements que tu ne porteras jamais. Il y a peu de choses qui te réconfortent et davantage qui te contrarient (et autant je peux me réjouir de t'apporter les premières, autant cela m'attriste de participer aux secondes). Tu es belle, le matin au réveil, même de mauvaise humeur. Le parfum qui te va le mieux est Flower et c'est dommage que tu le trouves trop léger, tu le portes si bien. La petite moue que tu arbores quand tu te recoiffes dans l'ascenseur est purement à craquer. Tu dédies des bols pour le sucré et d'autres pour le salé et tu n'aimes pas que le dentifrice soit replacé à l'envers à côté du lavabo. Tu ronronnes de plaisir quand tu t'immisces dans des draps propres, à moins que ce ne soit ton chat lorsqu'il vient se blottir contre toi (lui, il a le droit). Tu crois que tu ne peux être heureuse. Tu es sexy en talon et tu aimes enfiler ton vieux pull rose clair doudou quand tu restes seule chez toi.

Tu ne m'aimes pas.

mercredi, juillet 28 2010

Tout va bien

- Qu'est-ce-qu'il y a?

(Y'a que je t'aime, que je t'aime et que tu calcules même pas ce que ça implique. Y'a que mon humeur est aussi changeante que la météo sur le cap horn. Y'a que ces angoisses de merde reviennent parce que j'ai peur de te perdre, parce que j'ai peur que tu me foutes au fond de ton sac, entre tes clopes et tes tampax et que tu finisses par m'oublier et me jeter comme un vieux chewing gum. Et j'en crève de trop t'aimer et de me brider constamment. Si je me posais un peu moins de questions, si j'arrivais à lâcher un peu de mou et laisser simplement les choses venir, ça coulerait tout seul mais même en le désirant de toutes mes forces, je ne parviens pas toujours à rester constant et serein. Y'a que je me rends compte à quel point je suis bien avec toi, à quel point tu m'apaises et que si je continue à merder comme ça, tu vas finir par me claquer entre les doigts et t'auras bien raison. Y'a que je me sens con à pas savoir comment m'y prendre, à rien piger à rien, à avoir sans cesse des attentes vis à vis de toi et que c'est certainement pas comme ça que je vais réussir à te retenir. Que c'est certainement pas comme ça que je vais rester.)

- Rien, rien. Tout va bien.

samedi, juillet 24 2010

Instantanés

Les souvenirs reviennent par bribes. Comme s'ils avaient été captés à la volée et jetés en vrac dans une petite boîte en carton, au fond du grenier à mémoire.

Des instantanés.

Des impressions. Une palette de couleurs diffuses.
Un chat. La sérénité et le bien-être et du bleu ciel dans un coin. Du rouge. Des cris, des larmes et de la colère. Des vêtements mouillés, des cheveux séchés en vitesse. Un sourire fugace. Et l'immense océan coincé entre quatre bords écornés. Des rides, du gris et de la souffrance. De la neige immaculée pour apaiser. Du jaune, intense et chaud et des dunes à perte de vue. La liberté se compte en grains de sable.
Un rire, un pique-nique et de la verdure tout autour. Les ténèbres, qui, si l'on n'y prend pas garde, finiront par engloutir tout le reste. Du rose, un peu, et des petites mains agrippées à un doigt.

De quelle couleur sont les larmes ?

samedi, juillet 24 2010

Le genou à terre

Tu t'écroules. Il y a eu cette salve de coups, des séries de crochets et d'uppercuts. Puis des cris vaporeux et lointains, un clapotis sourd au creux de tes oreilles et le silence absolu. Tes jambes chancelantes n'ont plus supporté ton propre poids. Alors tu as posé le premier genou au sol. Tu as baissé ta garde bien trop vite. Bien trop tôt. Ces premiers coups, tu les as encaissés sans broncher, mais ils t'ont démonté peu à peu. Alors, tu as été moins vif, tes pas sont devenus lourds et tes frappes hésitantes. Et tu n'as pu que subir, inéluctablement, les coups portés aux flancs, aux reins, aux côtes. La chair et les os.
Décompte. 1. (...). 2. (...). 3. Tu lèves la tête. Du sang perle le long de ta tempe en gouttes épaisses. Ta vision est floue, ta tête va imploser. Tu ne te relèveras pas. 4. 5. Ton corps, cotonneux, ne ressent plus la douleur et, même si les choses autour de toi reprennent forme, tu sais qu'il te sera impossible de reprendre le combat. 6. Il te reste 4 minuscules secondes: tu dois te battre. D'abord contre toi. Ce sera ta première victoire. 7. Tu réunis tes dernières forces. Tu n'as qu'une infime chance de pouvoir aller au bout. Au bout de toi-même. 8. D'abord les bras, le buste. 9. Puis le genou, celui qui a plié et t'a fait choir. Et enfin, les jambes. Elles ne tremblent plus.
Tu es à nouveau debout, prêt à bondir, la mâchoire crispée. Tu te laisses quelques instants pour serrer les doigts entravés dans tes gants et te redonner du courage. Tes yeux sont devenus profondément noirs, du noir des ténèbres. Là où l'espoir ou la souffrance n'ont plus raison d'être. Alors il n'y a plus de doutes, de douleurs et d'orgueil. Mais de la rage.

dimanche, juin 27 2010

Tôt ou tard

Cette maudite boule au ventre est revenue, sans crier gare. La désagréable sensation que, où qu'elle puisse aller, elle ne t'emmènera pas dans ses bagages. Son départ se fait de plus en plus proche et tu profites de ces instants comme les derniers parce que tu en connais trop la valeur. Et tu tentes d'engranger le moindre détail avant qu'il ne soit trop tard au lieu de compiler toutes les raisons qui te convaincraient de la laisser partir. Parmi ces raisons, il y en a une qui devrait couper court à tous tes doutes, toutes tes attentes: elle ne t'aime pas. C'est comme ça. Personne n'y peut rien. Les petits papillons de son coeur se sont envolés il y a déjà quelques temps. Et pourtant, tu t'obstines encore à nier les évidences, à croire que les choses finiront par changer. Tu sais que dans quelques jours ou quelques mois, on devra, toi et ton coeur en miettes, vous ramasser à la petite cuillère. En attendant, tu fais consciencieusement ton devoir de mémoire; tu ne veux pas laisser s'échapper le moindre souvenir. Tu voudrais les emprisonner à jamais. Ce sont les seules choses qui resteront d'elle.

Tôt ou tard, les choses prendront fin.
Tôt ou tard.

dimanche, juin 27 2010

crêpes au whisky

Préparez la pâte.

Buvez une gorgée de whisky.

Faites chauffer une poêle.

Buvez encore deux gorgées de whisky.

Mettez un peu d'huile dans la poêle.

Mélangez une cuiller avec la pâte.

Buvez encore 3 whiskys de gorgée.

Mettez un peu de poêle dans la pâte.

Encore buvez 4 whiskys de gorgée.

Patelez bien l'étale.

Cherchez une autre wouteille de bisky.

Versez un wherre de visky autre.

Crépez la tourne.

Faites cuire le whisky encore une petute minite.

Sortez la poêle de la crêpe.

La crêpe relevez du plancher.

Beurrez du mettre cure la sêpe.

Crêpez le sucre.

Boutez encore une autre whisky cherche.

Tes la mable et versez un verre de crêpe.

(et pour une recette validée par une authentique bretonne, 2 oeufs, 150 g de farine+maizena, 1/2 sachet de levure, 1/2 sachet de sucre vanillé, 20 g de beurre fondu, 1/3 litre de lait et une cs de rhum)

mercredi, juin 9 2010

L'interrupteur

La douleur s'est intensifiée. Elle en est devenue insupportable. Sur cette échelle arbitraire établie par un consortium de soignants, tu la situerais entre 8 et 9. Tu dors bien trop peu et ton sommeil est de plus en plus agité. Tu as pris tous les analgésiques et psychotropes que tu avais à portée de main. Même si tu es loin d'avoir exploré toute la classe des narcotiques, tu en as testé un large panel. Rien n'y a fait.

Et, soudain, le noir, le silence, le rien.
C'est assez étrange, cette absence de sensations. Plus de douleur, plus de fantômes, plus de perceptions. ça n'a pas duré plus d'une fraction de seconde. Un moment infime pendant lequel sans doute tu es mort. Et puis, tu as recouvré peu à peu tes sens, et même si tu n'éprouves encore ni chagrin ni joie, tu es soulagé que quelqu'un ait rallumé la lumière.

samedi, juin 5 2010

Un contre un.

Ils sont deux. Peut-être plus.
Depuis quelques temps, ils se livrent une bataille vaine et futile.
Une bataille perdue d'avance.

Tu sais bien que, tour à tour, l'un prendra le dessus et investira ton esprit tortueux. Les autres, silencieux, se tapiront dans l'ombre et attendront patiemment d'être à nouveau maitres des lieux. Ce n'est qu'une question de temps. Alors tu ne seras jamais tout à fait serein.

Tes démons t'entrainent irrémédiablement au fond de l'abîme; de trop tu étreins la nuit. Tu aimes l'odeur de sa peau et tu refuses de l'appeler. Tu peux être froid comme la pierre, tendre, aimant, effleurer ce bonheur qui sans cesse t'échappe. Tu peux être tout près d'elle, lui caresser la nuque et, la seconde d'après, effroyablement loin.

Tu n'es pas mélancolique. Tu n'es pas heureux.Tu n'es pas apathique. Tu n'es pas amoureux.
Tu es heureux. Mélancolique. Apathique et amoureux.

Ils continueront de se battre.

Un contre un. Contre un.
Contre un.

lundi, mai 31 2010

Ralenti

5 secondes.
L'autoroute. Ce flot constant d'exilés, d'errants, de tous ceux qui partent et de ceux qui reviennent. De ceux qui croient rentrer paisiblement chez eux. Un de ceux là, devant toi s'engage sur la voie de gauche.

4 secondes.
Il n'a pas vu le véhicule à sa hauteur sur le point de le dépasser. L'étau se resserre.

3 secondes.
Un choc sourd, brutal, puis la valse lente des cages de métal sur l'asphalte. Salve d'adrénaline. Tes pupilles se dilatent, tes muscles se contractent un à un. Le cri strident de l'acier contre la glissière de sécurité. Pour la voiture qui est devant toi et dont les pneus crissent dans une ultime tentative, il est déjà trop tard. Une brèche s'est ouverte sur la droite. Tu te laisses déporter et t'y engouffres.

2 secondes.
La tôle qui se froisse, devant ton impuissance, comme une vulgaire feuille de papier. Inéluctablement. Quatrième. Tu accélères. Tes mains crispées sur le volant. Tu ne passeras pas.

1 seconde.
Troisième. Le moteur hurle. Les roues adhèrent à nouveau. Tu écrases la pédale d'accélération de tout ton corps. La première voiture tournoie près de toi et se rapproche. Tu fermes les yeux.

Impact.
Tu ouvres à nouveau les yeux. Tu l'as entendu derrière toi. Tu n'y crois pas vraiment.

Et pourtant.

- page 1 de 2